Auteur :
Jean Ducourneau
Ostéopathe D.O ancien kiné
Adresse professionnelle : place des quinconces 1 rue d’Enghien 33000 Bordeaux
Mail : Ducourneau.j@wanadoo.fr
Site internet : https://www.mkperinat.com/
Evènement
Journées nationales d’études des infirmières puéricultrices au Futuroscope Poitiers juin 2016
Résumé : La plagiocéphalie est de plus en plus répandue chez le nouveau-né. Elle est
forcément associée à une attitude en torticolis et une asymétrie. Nous démêlerons, dans cet
article le lien entre tous ces mots ainsi que leur sens. Une bonne information sur le sujet
permet de diagnostiquer plus rapidement les plagiocéphalies et de donner des conseils
adéquats sur sa prise en charge.
Mots-clefs : plagiocéphalies, attitude en torticolis, asymétrie, contraintes, densité, mobilité
Introduction
Comment s’expriment les plagiocéphalies, asymétries et torticolis dans le corps et le crâne ?
Que deviennent-elles et comment s’expriment-elles dans la posture et dès le début de la
station debout ?
A partir de quand les asymétries posturales crâne et corps sont pathologiques ?
Quelle est la place de l’ostéopathe dans tous ces problèmes ?
Quel intérêt pour l’infirmière puéricultrice ou comment s’approprier ces éléments pour la
pratique soignante en présence des plagiocéphalies ?
La plagiocéphalie
La plagiocéphalie est l’indication qui conduit le plus souvent à la consultation en ostéopathie
chez le bébé.
Ce sont parfois les parents qui s’en aperçoivent en premier, mais l’amour arrondissant les
angles, il vaut mieux un professionnel averti dont le regard est plus objectif pour analyser et
diagnostiquer. Ces professionnels sont souvent les puéricultrices.
Le mot plagiocéphalie vient du grec plagios qui signifie oblique et céphalée, tête.
On parle bien d’asymétrie ou de déformation d’un côté.
Cette plagiocéphalie est remarquablement visible vu du dessus de la tête. En effet, de
face, on peut avoir une asymétrie qui n’est pas forcément toujours annonciatrice d’une
plagiocéphalie.
Nous parlerons des plagiocéphalies dites positionnelles, à l’inverse des plagiocéphalies sur
craniosténose qui nécessitent une intervention chirurgicale sans conséquence pour le cerveau
puisque superficielle, extra durale. Ce type de plagiocéphalie est rare.
Il existe deux grands types de plagiocéphalies positionnelles :
– la plagiocéphalie primaire que l’on retrouve dès la naissance
– la plagiocéphalie secondaire qui apparaît quelques semaines après la naissance.
Plagiocéphalie et asymétrie
Il peut y avoir une asymétrie tête et corps sans plagiocéphalie alors que la plagiocéphalie est
forcément asymétrique.
Ce détail a son importance chez l’adulte car lorsque le bébé n’a pas de plagiocéphalie,
l’asymétrie peut passer inaperçue. Or, de nombreux adultes présentent une asymétrie sans
plagiocéphalie. Ce détail se retrouve sur toutes les entrées posturales que sont les yeux (port
de lunettes,) le bassin incliné comme les radiologues disent (et on porte des semelles), les
dents avec l’orthodontie.
Bien sûr on retrouvera toutes ces problématiques avec les plagiocéphalies devenues adultes.
Évaluation visuelle de la plagiocéphalie
Description du dessus
Dans ce cas, on remarque la plagiocéphalie à l’arrière droit
Cette photo 1, l’oreille droite est plus en avant que l’oreille gauche comme poussée par
l’arrière. Le front est plus proéminent vers la droite. Le côté droit est plus bombé, alors que le
côté gauche décrit une concavité.
Ce type de plagiocéphalie que l’on appelle strain est le plus courant. Schématiquement il
s’agit d’une modification de la position entre l’occiput et le sphénoïde.
Sur ce schéma le sphénoïde, en avant, est articulé avec l’occiput en arrière. Entre les deux, l’articulation ou symphyse sphéno-basilaire (occiput) est en strain.
Description de face
La plagiocéphalie a des conséquences sur la face (schéma à gauche).
On peut observer un œil fermé droite et un plus ouvert, une déviation de la bouche à gauche matérialisée par la sucette, une déviation du nez, une différence de grosseur des narines, la ligne du front et les grosseurs des joues.
Sur le dessin du bas, c’est le sphénoïde qui va modifier la position du maxillaire supérieur.
Sur cette photo (à droite) la sucette est déviée de l’autre côté (à droite) par rapport au dessin avant,
l’oeil paraît fermé à droite. Le haut du visage est influencé par le sphénoïde. L’occiput
influence, indirectement (via le temporal) le bas du visage et conditionne la position de la
sucette et donc de la mandibule dévié ici vers la gauche.
Sur la photo ci-contre, on observe la position en attitude en torticolis.
La plagiocéphalie se retrouve du côté de la position préférée de la tête. On discerne un côté
fermé à gauche sur le corps qui signe la virgule avec la jambe plus repliée à gauche comme le
bras très souvent.
C’est l’attitude typique globale en virgule avec l’attitude en torticolis de la
tête qui montre son côté préférentiel à droite.
Sur le carré de droite, en résumé, ces quatre photos signent les vues et les détails à observer
qui doivent alerter et signaler une plagiocéphalie.
Description de derrière*
On remarque les frottements à droite qui signent la présence de la plagiocéphalie.
Elle signale de manière indiscutable la préférence à positionner sa tête du côté droit.
Cette observation sera un élément capital de la bonne évolution de la plagiocéphalie, car si les
frottements gagnent vers la gauche cela signifie, de manière objective, que les appuis se feront
à gauche et donc que les mobilités s’améliorent. Cette mobilité de la tête et du corps (virgule
du côté opposé) va dans le sens d’une récupération de la plagiocéphalie.
Le torticolis
Le torticolis, à ne pas confondre avec l’attitude en torticolis, est devenu très rare car les
méthodes d’extraction ont évolué et les accouchements à risque finissent souvent en
césarienne.
Le torticolis, par définition résultera le plus souvent d’une lésion musculo-aponévrotique du
muscle sterno-cleïdo-mastoidien ou du scalène lors d’une expulsion énergique empêchant la
tête de tourner du côté opposé. La moindre tentative de rotation de tête provoquera une
douleur immédiate.
Mais on retrouve des causes par ischémie ou parésie du nerf crânien spinal (qui innerve le
muscle sterno-cleïdo-mastoïdien) en intra-utérin et qui engendre une position préférentielle du
côté opposé.
De toutes les manières, dans la majorité des cas il y a toujours en intra–utérin, une attitude
préférentielle ou attitude en torticolis avec plagiocéphalie ou pas.
Il est fondamental d’aborder le bébé dans sa globalité et ne pas s’intéresser uniquement à la
rotation de tête et la seule problématique d’un muscle.
Diagnostic différentiel en torticolis et attitude en torticolis
Le diagnostic différentiel se base sur un test clinique.
Il s’agit de démontrer que le bébé a une préférence mais que les deux positions sont possibles.
Si c’est le cas on aura une attitude en torticolis et non un torticolis.
Génése d’apparition des plagiocéphalies
Les causes
• Les causes couramment avancées
“C’est l’appui qui déforme”. Ce postulat doit être nuancé.
Il paraît convenu qu’étant toujours sur le côté, le nouveau-né se déforme la tête et cela donne
la plagiocéphalie. Mais alors les plagiocéphalies primaires apparues dès la naissance ? On dit
que c’est l’accouchement qui a appuyé. Et les plagiocéphalies primaires qui sont détectés à la
naissance suite à une césarienne ? On dit que ce sont les contraintes intra-utérines.
Tout cela montre que l’apparition de la plagiocéphalie avec toutes ses diversités est un
phénomène bien plus complexe ou d’autres facteurs et d’autres explications seront nécessaires
et utiles pour la prise en charge de celles-ci.
• La transmission de forme
On peut se poser la question de savoir s’il y a une transmission de forme. La forme, dans son
asymétrie avec légère plagiocéphalie , pourrait se retrouver chez l’enfant. Ceci n’a pourtant
pas été montré d’un point de vue scientifique mais peut s’observer dans la pratique clinique
quotidienne. Pour ces enfants, si la plagiocéphalie n’a pas été accentuée accidentellement en
intra-utérin ou à l’accouchement, la démarche thérapeutique pourra être différente. Il
conviendra non pas d’essayer de corriger la plagiocéphalie mais d’accompagner cette posture
asymétrique tout le long de la croissance en proposant toute une palette de solution par
différents professionnels (ostéopathes, podologues, orthodontistes, orthoptistes,
kinésithérapeutes), aux différents stades de développement.
• Les contraintes intra-utérines
Il paraît évident que les contraintes intra-utérines vont créer des conditions d’apparition des
plagiocéphalies :
– le manque de place dû à des contractions aphysiologiques et signalant une menace
d’accouchement prématuré,
– un fœtus porté bas ou engagé très tôt,
– un fœtus en siège,
– des jumeaux,
– des malformations utérines (utérus bicorne).
Ces facteurs sont souvent avancés mais ne sont pas forcément présents.
• Les contraintes d’accouchement
Les contraintes d’accouchement ne déforment que dans l’instant. Elles peuvent être les
suivantes :
– un accouchement avec des ralentissements où les contraintes augmentent les pressions
sur le crâne,
– les forceps,
– les cuillères.
Explication
Les contraintes créent une lésion (en ostéopathie). L’endroit impacté entraîne une zone de
densité tissulaire. Cette densité est moins souple et est moins réactive lors de la croissance du
crâne. Le cerveau, moteur de la croissance du crâne, cherche de la place ailleurs et c’est ainsi
qu’un mouvement asymétrique est enclenché.
Ceci est un schéma en coupe horizontale du crâne. Les flèches extérieures représentent les contraintes (symboliques) et les flèches intérieures, la croissance du cerveau.
Entre le premier et le troisième se déroulent plusieurs semaines.
Solutions thérapeutiques
Avant tout, le diagnostic doit être fait le plus rapidement possible et dès la maternité. Les
puéricultrices sont donc souvent en première ligne pour évaluer et orienter.
L’ostéopathie
Dans l’ordre, il faudra un ostéopathe car son travail ne sera pas analytique mais global. Il ne
s’agira pas simplement de lui tourner la tête du côté ou de lui bloquer…
Il faut savoir qu’un nouveau-né a peu de force dans le cou et sa préférence est donc bien
marquée.
D’un point de vue psychomoteur autour de 3 mois, les muscles du cou sont de plus en plus
disponibles préparant la verticalité et c’est un moment important de la sollicitation.
C’est plus son système fascial qui intéresse l’ostéopathe. Les fascias correspondent à tous le
système d’enveloppement des muscles mais aussi des viscères et on les retrouve également
autour du cerveau (membrane de tension réciproque)et du crâne osseux qui est parcouru de
muscles.
Les fascias enregistrent les positions telle que l’attitude en torticolis et les traumatismes
comme à l’accouchement ou les contraintes de grossesse. Ils influenceront la forme et la
posture et cela tout le long de la vie.
C’est sur ce tissu que nous interviendrons et sans force et dés la naissance.
Il faut préciser que la prise en charge de la grossesse en ostéopathie pourra diminuer les
contraintes et améliorer le confort de la maman et du foetus. Ce travail diminuera les
conditions d’apparition de la plagiocéphalie.
La kinésithérapie
La kinésithérapie est fondamentale. Ces kinésithérapeutes, si ils sont formés, pourront
compléter l’équipe à la prise en charge des plagiocéphalies et bien sûr des torticolis et attitude
en torticolis. Le kinésithérapeute formé à la périnatalité (mkperinat.com) travaillera sur les
mobilités de la tête mais aussi de l’ensemble du corps et suivant les étapes de développement
psychomoteur comme l’a bien décrit Michele Forestier kinésithérapeute dans son ouvrage
« de la naissance aux premiers pas ».
En effet cela permettra de stimuler les chaines musculaires déficientes dans la globalité au
lieu d’être focalisé sur la seule rotation de tête ou l’inclinaison déficiente par des exercices
analytiques souvent voués à l’échec.
Les casques
Ils commencent à apparaître en France à Lyon et Toulouse et depuis peu à Angers. Ils
complètent l’équipe (ostéopathes et kinésithérapeutes) en particulier lorsque les
plagiocéphalies sont très importantes.
Ils doivent toujours être associés à une prise en charge en ostéopathie et en kinésithérapie.
Pour moi, ils ne sont pas nécessaires mais les parents surtout à cause d’internet ou du
martelage de certaines associations et surtout la peur et l’impatience bien compréhensible
cèdent aux casques. Lorsque je sens leurs déterminations trop fortes, je ne m’y oppose plus
d’autant plus qu’il continue l’ostéo et la kiné.
Les casques sans l’ostéo et la kiné pourront avoir un résultat mais le danger c’est que les
forces engendrées pour la correction sans ostéopathie vont déplacer les contraintes et les
conséquences sur la posture seront préjudiciables.
Organisation prise en charge
En France, les pédiatres peuvent organiser cette prise en charge. En tout cas pour l’instant,
c’est souvent un chemin de croix qui attend les parents.
On leur dira souvent que ça reviendra tout seul, que l’ostéopathie ne sert à rien et que la
kinésithérapie devrait suffire (sans vérifier si le kinésithérapeute est formé). Les puéricultrices
en maternité ou en service de Protection Maternelle et Infantile peuvent orienter les parents
vers un professionnel formé.
Conseils aux parents
Plusieurs conseils peuvent être donné aux parents :
– Le mettre sur le côté et sur un autre sur surveillance
– Encouragez la rotation sans la forcer, tenant compte de l’observation précédente (les
muscles du cou ne sont pas très forts dans les deux premiers mois).
– Disposez le bébé de manière à favoriser la rotation de tête du côté opposé. Cela
fonctionne bien le premier mois, un peu moins le deuxième et plus du tout le
troisième.
– Solliciter l’enfant en actif( bruit regard)
Ces conseils ne suffisent pas s’ils ne sont pas accompagnés d’une prise en charge (ostéopathie
et kinésithérapie). Sans cette prise en charge, cela reviendra tout seul en quelque mois.
Plagiocéphalie et posture
Une plagiocéphalie se déroule, se retrouve dans la tête et le corps.
Mais quelque soit la qualité de la prise en charge, il restera toujours une trace asymétrique.
Dès l’instant où nous portons des semelles que nous avons eues de l’orthodontie ou que nous
portons des lunettes ou les trois en même temps, nous retrouverons un schéma postural de
naissance asymétrique.

Attitude en torticolis bébé et enfant debout

Posture de l’adulte suite plagiocéphalie
Certes l’attitude scoliotique qui n’est pas une scoliose est ici un peu forcé.
Souvent elle ne laisse une trace que le radiologue ne prend pas soin de souligner.
Par contre il vous trouvera le bassin “incliné”. Le podologue trouvera lui une jambe plus
courte.
L’adulte pourra garder la trace très discrète d’une plagiocéphalie, masquer par les cheveux.
Mais on trouvera facilement une posture avec un pied plus ouvert, la position du bassin, une
posture de tête inclinée et en rotation, un oeil plus petit, la bouche légérement dévié, les dents
en contact décalées.
Conclusion
La plagiocéphalie est une prise en charge complexe, parfois longue et qui nécessite une unité
thérapeutique , réconfortante pour les parents. Ceci est souvent loin d’être le cas. Pour autant,
les mentalités évoluent.
Il faudra se rappeler que la plagiocéphalie est indissociable de l’attitude en torticolis voire du
torticolis. Il semble fondamental de retenir que la prise en charge est pluriel avec ostéopathes,
kinésithérapeutes et casques si la plagiocéphalie est majeure. Bien evidemment les conseils
aux parents de sollicitation et de placement des professionnels de santé font consensus.
Enfin la plagiocéphalie doit s’inscrire dans le futur chez l’enfant, l’adolescent et l’adulte sur
l’angle de la posture. En effet à tout âge la bonne connaissance des problématiques posturales
qui viennent de la naissance permettra de diriger vers les différents intervenants médicaux et
paramédicaux.
Remerciements :
Merci à une de vos consœurs Marie Pierre Galaraga ancienne coordinatrice PMI à
Bordeaux, pour m’avoir ouvert les portes en 2002.
Bibliographies
Dessins Jean Ducourneau et Julien Félix et associés graphistes et photos Jean Ducourneau
« De la naissance aux premiers pas » Michele Forestier ed érès
“Bébés, parents et grands-parents des rencontres inattendues” Franck Dugravier
ed Philippe Duval
“Bien naître par l’ostéopathie” Jean Paul Saby Ed Sully
Approche ostéopathique des plagiocéphalies avec ou sans torticolis
Nicette Sergueef ed SPEK
“Masser bébé “le toucher du Coeur par Rachel Izsak Simonet de Jouvence
“Osteopathie pour les bébés” Raymond Solano ed Sully
“Approche ostéopathique des plagiocéphalies avec ou sans torticolis” Nicette Sergueff ed
SPEK
“Masser bébé” Rachel Izsak Simone ted Jouvence