Ils assurent des consultations d’ostéo gratuitement au Réseau Paul-Bert et dans les PMI, auprès de personnes qui n’ont pas les moyens, beaucoup de mères et d’enfants.
Un jour, il a poussé la porte du Réseau Paul-Bert dans la rue éponyme. Immeuble improbable en plein centre-ville. Un toit avec un jardin dessus et un potager bio à même le trottoir. Une vie à l’intérieur qui bouillonne; ça piaille, ça chahute, ça sent la cuisine et la chaleur humaine. Jean Ducourneau, ostéopathe à Bordeaux, se renseigne. Qui vient là? On y fait quoi? “Il a trouvé l’endroit attachant, intéressant et nous a dit : “On pourrait faire quelque chose ensemble”…” C’est Emmanuel Jourdes qui raconte, le directeur de ce centre social et culturel insolite et généreux.
De fait, Jean Ducourneau, ostéo dans un beau quartier, a fondé en 2010 l’association Périnatalité ostéopathie. L’APO, “comme la peau”, aime-t-il bien préciser. L’APO a pour vocation de proposer des soins ostéopathiques gratuits à des jeunes mères, des femmes enceintes, des bébés qui n’y ont pas accès, pour des raisons culturelles et économiques. une fois par mois, des ostéopathes dûment formés participent spontanément, sur la base du volontariat, à des séances dans des services de Protection maternelle infantile (PMI). Ils sont plu de 40 à Bordeaux, mobilisés autour de ce projet, qui prend sens au fil des années. Donc, lorsque Jean Ducourneau a poussé la porte du Réseau Paul-Bert, rencontré son “patron”, le volubile Emmanuel Jourdes, croisé l’équipe pluriprofessionnelle, l’esprit du lieu et des gens qui l’habitent, son appétence altruiste a fait le reste. On y va.
Pas de caritatif ou presque pas
“Ici, on n’est pas dans le caritatif affiché, note Emmanuel Jourdes, les gens viennent et payent. Ainsi, notre restaurant, où l’on mange bio, est payant. 4 euros le repas pour tout le monde. Viennent des gens fauchés certes, mais aussi d’autres, qui apprécient la mixité, le brassage de cultures, de sociologie. On a beaucoup de travailleurs pauvres, vous savez, tous ces gens qui vivotent de petits boulots, de temps partiels. Et comme on n’est pas à cours d’idée, on vient d’acquérir un vélo-taxi, financé par Bordeaux-Mécène-Solidaire qui amène des personnes âgées du quartier, jusqu’ici. On a un hammam en sous-sol, avec des massages pour 5 euros. Donc, à priori, l’ostéopathie pouvait trouver sa place ici.”
Et comment. très vite, Séverine Tardy, l’assistante sociale du Réseau Paul-Bert, a accueilli des candidats à une séance d’ostéo. “Une dizaine chaque fois, admet-elle. Beaucoup de mamans un peu inquiètes, avec leur bébé, mais aussi des gens qui ont des douleurs et n’ont pas les moyens d’aller chez un ostéopathe, des femmes enceintes. La demande est très forte, constante.”
Victoire Garandeau, ostéopathe à Mérignac, participe régulièrement à ces soins offerts : “On est là pour prendre du temps, instaurer une confiance. on sait que ces gens ne viendront jamais dans nos cabinets. il s’agit juste de leur faire un peu de bien, soulager. Au début, on faisait ces séances dans le hammam, mais ce n’était pas adapté. Les gens pensaient qu’on allait les masser et leur donner du thé à la menthe. Désormais, l’aspect soin de notre démarche est mieux compris.”
Parfois une séance suffit
Certains reviennent plusieurs fois dans l’année. D’autres se contentent d’une séance et repartent soulagés. “Il arrive que l’on oriente des personnes vers un kiné, en fonction de leur état. Ils ne savent pas qu’ils y ont droit avec la CMU (couverture maladie universelle) par exemple. La vocation de l’APO est de s’étendre à toute la gironde. les besoins sont là, nous sommes suffisamment d’ostéopathes bien formés.”
Un congrès de l’ostéopathie humanitaire
L’association périnatalité ostéopathie de Bordeaux (Fedosoli) organise demain et samedi, à Bordeaux, les 5èmes journées de Fedosoli, sur le thème “Forme, où est la norme?” Fedosoli est une fédération regroupant des associations investies dans l’ostéopathie à visée sociale et humanitaire, dont l’APO (Association périnatalité ostéopathie). Ce congrès est ouvert à tous les professionnels de la petite enfance, mais plus largement aux personnes intéressées par le sujet (sachant qu’il vaut mieux s’inscrire à l’avance).
Il débute demain soir à 19h30, au Réseau Paul-Bert (2 Rue Paul-Bert à Bordeaux) par l’accueil de toutes les associations autour d’un repas multi-culturel, offert par les bénévoles du Réseau. Samedi, à l’Athénée, à 9 heures, des conférences en présence d’ostéopathes, mais aussi de psychanalystes, d’enseignants, de dentistes, podologues se succèderont. Par ailleurs, se tiendront des ateliers. le thème tournera autour de l’identité posturale, partant d’un principe fort : “C’est l’inertie qui est la maladie et le mouvement, la solution.” Renseignements : contacts@journeesdefedosoli.org
Source : Sud Ouest du 29 mars 2018 | Par Isabelle Castéra